Naviguer dans les eaux norvégiennes est une expérience inégalée, qui associe la rigueur du climat nordique à un boulot bien payé offrant beaucoup de temps libre (ou à la passion ardente de la pêche).
Au cours de mes périples, j’ai eu l’occasion d’expérimenter deux techniques majeures : la pêche à la palangre et la pêche au filet. Chacune offre ses propres défis et avantages. Plongeons dans ces deux mondes, entre anecdotes personnelles et précieuses informations.
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La pêche à la palangre : Une technique ancestrale
- Historique et principes
La pêche à la palangre remonte à des siècles en Norvège. Elle implique l’utilisation de longues lignes, avec des hameçons appâtés à intervalles réguliers. Sur le bateau de taille moyenne où j’ai travaillé, ces lignes s’étiraient sur une impressionnante distance de 50 km.
Chaque trip se déroule en gros de la manière suivante : nous partons en mer pendant 6 à 8 semaines, avec 14/15 membres d’équipages (sur mon bateau en tout cas, il y en a des plus petits, mais aussi des beaucoup plus gros). Nous déployons les lignes, puis nous les remontons, en espérant avoir attrapé des poissons. Les prises sont ensuite triées, et préparées. Nous remplissons le bateau de poissons en 3 à 4 semaines, puis nous rentrons au port pour vendre notre pêche, et refaire le plein de nourriture, d’appâts et de carburant. Puis nous repartons en mer une seconde fois.
Après ces 2 sessions, l’équipage change et l’opération recommence, permettant ainsi de pêcher toute l’année sans interruption.
- Ma routine quotidienne
Les journées débutent tôt à l’aube, durant 4 ou 5 heures, nous déployons les lignes. Le reste de la journée est consacré à la remontée des lignes, à la capture (attraper et égorger les poissons désirés, relâcher les indésirables) et à la préparation des poissons pour la vente, mais également à remettre en ordre les cordes et les hameçons. Ces d’ailleurs notre tâche principale. Nous devons nous assurer que les hameçons et les cordages sont en bon état et prêts à être utilisés. Cela implique de les nettoyer, de les réparer et de les remplacer si nécessaire. Un travail fastidieux, mais essentiel.
L’organisation est primordiale, avec un système de rotation des effectifs opérants 24/7. C’est donc tous les jours lundi, et on travaille deux rotations par jour de la manière suivante : 8 heures de travail, 4 heures de repos, 8 heures de travail, 8 heures de repos, etc.
Sur une bonne journée, nous attrapons jusqu’à six tonnes de poissons, comme la lingue, le lieu et la moruette. Ces prises peuvent représenter jusqu’à 300 000 euros à la revente, divisés équitablement entre tous les pêcheurs.
- Les défis
Malgré l’excitation d’être en haute mer et de la paie, cette technique est éprouvante. Mes mains en témoignent, j’ai du mal à les fermer. Je dois ressembler à un zombie ! La fatigue est une réalité constante. Petit point rassurant : beaucoup de mes « fisherman’s friends » (je voulais la faire celle-là) avaient juré de ne plus jamais remonter sur un bateau après leur première expédition de pêche à la palangre. Pourtant, ils sont toujours là, ce qui me donne de l’espoir pour la suite.
Sur ce, après avoir mangé une 5e fois dans la journée (la norme ici), je m’en vais me recoucher. Je me rapproche de mes 7 semaines de repos, qui seront bien méritées. Encore un petit effort. Mon prochain départ sera au début de l’hiver, pour la mer des Barents cette fois, où l’on se concentrera sur les morues et cabillauds. En hiver, la mer est plus agitée et la quantité de poissons plus importante. Je suis impatient de voir ça.
La pêche au filet : Quand modernité rime avec efficacité
- Les bases
Exclusivement en février et mars, soit 5 ou 6 trips par an seulement, le premier un peu long le temps de localiser les poissons, et ensuite plus ou moins 10 jours à chaque fois pour remplir le bateau (le trip le plus rapide a été de 6 jours, avec une moyenne de 25/30 tonnes par jour il y a deux ans).
La pêche au filet, à ne pas confondre avec la pêche au chalut, est une méthode plus moderne. Nous utilisons de nombreux filets de nylon positionnés entre deux cordes espacées de 4 mètres en largeur (profondeur en faite), sur 25 mètres de long. On dispose d’un total de 10 « lots » de 50 filets, soit 500 filets que nous déployons chaque nuit, et que nous remontons chaque jour.
Il faut entre 40 minutes et 3 heures par lot selon la quantité de poissons. C’est vraiment surprenant la manière dont tout ça ne finit pas en un gros tas de nœuds ! Le principal souci est de sortir les poissons des mailles du filet. Les poissons sont ensuite triés, et placés dans des bacs de glace.
- La routine et les captures
Le rythme est, d’une certaine manière, plus humain. Contrairement à la palangre, nous dormons la nuit. Les poissons ciblés sont principalement le lieu noir, avec quelques cabillauds et lingues en bonus.
- Avantages et inconvénients
L’un des avantages majeurs de cette technique est le rythme de travail. La lumière du jour, surtout lorsqu’on revient de la mer des Barents, est un véritable boost pour le moral. Toutefois, cette technique présente des défis. Les journées sont longues, et il faut toujours être prêt à agir en fonction des indications du capitaine. De plus, le travail est plus physique. Le défi de sortir les poissons des filets est éreintant, surtout après la fatigue accumulée lors des précédentes sorties.
Les bons côtés par rapport à la pêche à la palangre :
- Le rythme qui est plus ou moins normal, on dort la nuit et on travail la journée, de même que les horaires des repas qui sont plus ou moins respectées.
- La lumière du jour quand on arrive de la mer des Barents, de 8 h à 18 h, qui fait beaucoup de bien au moral !
- On bosse tous ensemble, ce qui a un petit côté convivial (quand tout va bien évidemment).
Les mauvais côtés par rapport à la pêche à la palangre :
- La longueur des journées de boulot, de 8 h 30 à 23 h en moyenne. Et un jour sur deux on se relaie pour poser les filets. On ne sait pas vraiment combien de temps ça peut durer ni quand ça va commencer, puisque ça dépend de quand le capitaine trouve des poissons. Donc une fois la journée finit, il faut rester prêt et attendre le signal du capitaine ! Disons en gros 8 h 30-2 h quand on est de corvée « shooting ».
- La mer qui est vraiment mauvaise à cette période, on alterne mauvais temps et très mauvais temps (par exemple, même si les nuits paraissent longues, on dort mal, donc ce n’est pas facile de récupérer).
- Le travail est beaucoup plus physique, et mon petit corps gringalet souffre ! Toutes les rotations (4 postes, on tourne après chaque lot de 50 filets) sont physiques, donc dès qu’il y a du poisson, ben on a jamais le temps de souffler. Sans compter la fatigue accumulée du mois dernier…
En conclusion
Dans l’ensemble, peu importe la technique, pêcheur en Norvège est une aventure très enrichissante, au sens propre comme au figuré. Chaque sortie en mer est une occasion d’apprendre, de grandir et d’apprécier les merveilles de la nature et d’économiser un beau pactole pour voyager par la suite. La Norvège, avec ses eaux glacées et ses espèces diversifiées, offre une expérience inoubliable pour chaque pêcheur passionné, et des salaires parmi les plus élevés au monde.